Actualités - Droit social
Le montant minimal de l'indemnité de rupture conventionnelle n'est pas le même pour tous les employeurs
01/08/2018
Pour les employeurs qui n’entrent pas dans le champ de l’ANI du 11 janvier 2008, le montant minimum de l’indemnité de rupture conventionnelle individuelle correspond à l’indemnité légale de licenciement (et pas à l’indemnité conventionnelle). La Cour de cassation a donné une illustration de ce principe dans une affaire concernant France Télévisions jugée le 27 juin 2018.
Le contexte
L’employeur et un salarié peuvent rompre d’un commun accord le contrat de travail en signant une convention de rupture conventionnelle individuelle. Le salarié doit alors bénéficier d’une indemnité de rupture d’un montant minium.
Selon le code du travail, le montant de l’indemnité ne peut pas être inférieur à celui de l’indemnité « légale » de licenciement (c. trav. art. L. 1237-13 et R. 1234-2).
Mais il ressort d’un avenant de l’accord national interprofessionnel (ANI) à l’origine du dispositif que les employeurs doivent se baser sur l’indemnité « conventionnelle » de licenciement lorsque elle est plus élevée que l’indemnité légale de licenciement (ANI sur la modernisation du marché du travail du 11 janvier 2008 ; avenant n° 4 du 18 mai 2009, étendu par arrêté du 26 novembre 2009, JO du 27).
Pour autant, cet ANI et son avenant ne s’appliquent pas à tous les employeurs. C’est ce que la Cour de cassation souligne, sans la moindre ambiguïté, dans l’affaire jugée le 27 juin 2018.
L’avenant s’applique (instr. DGT 2009-25 du 8 décembre 2009, § 2) :
-depuis le 17 juin 2009 (lendemain du dépôt de l’avenant), aux employeurs adhérents aux syndicats patronaux signataires (MEDEF, CGPME, UPA) ;
-depuis le 28 novembre 2009, aux autres employeurs entrant dans le champ de l’ANI du 11 janvier 2008.
Il en résulte que pour les employeurs qui n’entrent pas dans le champ de l’ANI de 2008 et de son avenant, le montant minimum de l’indemnité de rupture conventionnelle individuelle correspond à l’indemnité légale de licenciement (et pas à l’indemnité conventionnelle).
L’affaire jugée le 27 juin 2018
Le 27 juin 2018, la Cour de cassation s’est penchée sur le cas d’un salarié, à qui seule l'indemnité légale avait été versée, et qui réclamait un complément au titre d'une indemnité conventionnelle plus favorable. Son employeur n'étant pas membre d'une des organisations signataires de l'accord et son activité (l’audiovisuel) ne relevant pas du champ d'application d'une convention collective de branche signée par une fédération patronale adhérente du MEDEF, de l'U2P ou de la CPME, le salarié ne pouvait prétendre à une telle demande.
S’il en était besoin, cet arrêt montre aussi que la liste des secteurs exclus du champ de l’ANI de 2008 mentionnée dans l’instruction DGT du 8 décembre 2009 n’est pas limitative.
Proposition de la Cour de cassation
À ce sujet, dans son rapport annuel 2017 présenté le 6 juin 2018, la Cour de cassation réitère une proposition de réforme, déjà formulée en 2015 et en 2016. Elle suggère de modifier le code du travail afin de prévoir que l’indemnité spécifique de rupture ne puisse être inférieure à l’indemnité de licenciement prévue par un accord collectif ou des dispositions légales plus favorables.
Selon elle, une telle réforme permettrait d’éviter de laisser perdurer une différence de régime entre les salariés selon que leur employeur est ou non lié par l’ANI du 11 janvier 2008 (https://www.courdecassation.fr/publications_26/rapport_annuel_36/rapport_2017_8791/suggestions_modifications_8800/reforme_matiere_8803/a._suivi_suggestions_reforme_39460.html).
Si aucun changement du code du travail n’est effectué, il faudrait un arrêté d’élargissement de l’ANI et de son avenant n° 4 pour que les employeurs n’entrant pas dans son champ professionnel (ex. : agriculture, presse, secteur sanitaire et social) soient concernés.
Cass. soc. 27 juin 2018, n° 17-15948 D