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LE JUGE DES REFERES PEUT ORDONNER LA CESSATION D'UNE ACTIVITE EXERCEE EN VIOLATION D'UNE CLAUSE DE NON-CONCURRENCE
01/04/2019
En l’absence de contestation sérieuse, c’est-à-dire dès lors que la clause de non-concurrence est a priori licite, une ordonnance de référé peut ordonner au salarié de mettre fin à son activité concurrente, éventuellement sous astreinte. La Cour de cassation confirme ici les prérogatives du juge des référés.
Défection au profit du concurrent du trottoir d’en face. - Une salariée d’une agence d’intérim avait démissionné de son poste d’assistance administrative et de recrutement pour passer au service de l’agence d’intérim concurrente… située sur le trottoir d’en face.
Soutenant que l’intéressée avait détourné une partie de sa clientèle et de ses intérimaires et que cela s’était traduit par une baisse sensible de son chiffre d’affaires, l’ancien employeur avait saisi les prud’hommes en référé.
Les juges avaient accédé à ses demandes et ordonné à la salariée, sous astreinte provisoire à compter des 48 heures suivant la notification de la décision, de cesser de commettre des actes de concurrence à l’encontre de son ancien employeur. L’ordonnance avait plus précisément interdit à l’intéressée de rentrer en contact avec l’ensemble des clients et intérimaires de son ancien employeur, dont la liste était d’ailleurs séquestrée auprès d’un huissier de justice.
Conditions de l’action en référé. - Lorsqu’un salarié viole une clause de non-concurrence, son ancien employeur est effectivement en mesure de saisir le conseil de prud’hommes pour que celui-ci ordonne à l’intéressé de cesser son activité concurrente, éventuellement sous astreinte.
S’il souhaite une décision rapide, l’employeur doit engager une action en référé (cass. soc. 10 décembre 1996, n° 94-43015, BC V n° 436 ; cass. soc. 16 mai 2007, n° 05-46046 D). Mais, pour être recevable, une telle action ne doit faire l’objet d’aucune contestation sérieuse (c. trav. art. R. 1455-5 ; cass. soc. 14 juin 2007, n° 05-45683 D).
C’est sur ce terrain que s’était placée la salariée pour contester l’ordonnance de référé.
Pas de contestation sérieuse. - En appel, la salariée avait soutenu que la demande de l’employeur se heurtait à une contestation sérieuse, dans la mesure où la validité de la clause de non-concurrence prêtait à discussion.
Néanmoins, pour la cour d’appel, cette validité ne se heurtait à aucune contestation sérieuse, compte tenu de l’étendue géographique (limitée à 5 départements du sud de la France) et de sa contrepartie financière prévue (conforme au montant fixé par accord de branche). La Cour de cassation valide cette interprétation.
Pas d’obligation de rompre le contrat de travail. - La salariée reprochait également au conseil de prud’hommes d’avoir violé le principe selon lequel le juge des référés n’a pas le pouvoir d’ordonner la résiliation du contrat de travail (cass. soc. 13 mai 2003, n° 01-17452, BC V n° 161). En effet, selon elle, la demande de son ancien employeur de cesser tout acte de concurrence ne pouvait que se traduire par la rupture de son nouveau contrat de travail.
Cet argument a également été balayé par la cour d’appel, toujours avec l’approbation de la Cour de cassation. Dans ce domaine, il faut s’en tenir aux termes employés. Le juge des référés a le pouvoir d’interdire la poursuite d’une activité exercée en violation d’une clause de non-concurrence (cass. soc. 28 mars 2012, n° 10-22847 D). Il n’y a pas lieu de s’interroger sur les conséquences possibles d’une telle interdiction. Dans cette affaire, le conseil de prud’hommes n’avait donc pas excédé ses prérogatives.
Cass. soc. 6 mars 2019, n° 18-10406 D